Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Distances de dispersion et migrations chez les chauves souris européennes, et comtoises !

publié le27 juin 2018

Nous savons qu’au cours de la phase hivernale, les chauves-souris adaptent leur rythme physiologique pour passer toute la mauvaise saison en léthargie (l’hibernation) dans des abris sombres, calmes, assez humides, stables en températures.

Passée cette période, les chauves-souris se déplacent quotidiennement en vol de nuit. Selon les espèces, et la saison, les comportements de vol et types de déplacement sont différents. Ce qui induit des variations saisonnières des routes et trajectoires de vol.

Il existe quatre grands types de déplacements :

– Entre gîtes diurnes et terrain de chasse ;

Les distances parcourues vont de quelques centaines de mètres pour les espèces les moins mobiles à quelques dizaines de kilomètres. Pour une majorité d’espèces, ces transits s’effectuent le long d’éléments structurés du paysage, tels que les haies, alignements d’arbres, lisières, vallée, etc. qui leur permettent également de chasser, mais aussi de se protéger des prédateurs. Par exemple, certaines espèces suivent les haies et lisières comme corridor, garde manger, à l’abri de la vue des prédateurs aériens, plutôt en début de nuit, et dès lors que la nuit est noire, elles peuvent traverser de plus grandes étendues à découvert.
L’existence de corridors arborés d’autant plus est importante à proximité des gîtes.
Des trajets beaucoup plus directs peuvent également exister, notamment pour les espèces de haut vol (Molosses, Sérotines, Noctules, et Minioptères).

– Entre gîtes saisonniers ;

Certaines espèces utilisent un réseau de gîte au cours de leur cycle biologique annuel. Ces différents gîtes sont les : gîte de transit printanier, gîte estival, gîte de reproduction, gîtes de transit automnal et gîte d’hibernation. Ils peuvent être utilisés lors d’une ou plusieurs de ces périodes et peuvent être éloignés de plusieurs dizaines, voire centaines de kilomètres.
Ces déplacements entre gîtes saisonniers favorables peuvent donc être plus importants en distance que les déplacements entre gîte et terrains de chasse.
Par exemple, le Minioptère de Schreibers est connu pour fréquenter un réseau de gîtes souterrains dont l’échelle dépasse les limites régionales. Des individus bagués en Suisse lors de programme de recherche sont régulièrement observés (relecture de bague) dans les cavités Franc-Comtoises. D’ailleurs, les suivis et observations recueillis pour cette espèce, réalisés à quelques jours d’intervalle, montrent des fluctuations d’effectifs des individus par site au sein d’un réseau fonctionnel de cavités favorables à l’espèce et distantes de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de kilomètres les unes des autres. D’où l’intérêt pour les chiroptérologues de réaliser des suivis en simultanés de plusieurs gîtes fréquentés par l’espèce.

– Les migrations sur de plus longues distance entre quartiers d’hiver et quartier d’été ;

Elles sont pratiquées par quelques espèces de chauves-souris, comme la Noctule commune (max connu de 1546), la Sérotine bicolore (max connu de 1780 kms), la Pipistrelle de Nathusius (max connu de 1905 kms), la Noctule de Leisler (max connu de 1567 kms), selon un axe général européen Nord-Est / Sud-Ouest en Europe. Les connaissances sur les phénomènes de migration, encore partielles, s’approfondissent progressivement au travers de divers suivis scientifiques effectués, mais aussi au gré des découvertes souvent macabres au pied d’éoliennes.

C’est essentiellement grâce aux lectures de bagues issues de programmes de recherche sur les déplacements des chiroptères (comme ceux menés en Lettonie, à la station ornithologique de Pape) que sont reconnus ces déplacements migratoires. Complémentairement, des suivis réalisés au niveau des passages de cols de montagne, en périodes tardives estivales et automnales, (exemple, lien : BILAN 2017 DU SUIVI DE MIGRATION AU COL DE LA BATAILLE : http://www.lpo-drome.fr/bilan-2017-suivi-de-migration-col-de-bataille/), ainsi, mais aussi au niveau des littoraux et des grandes vallées alluviales, principalement permettent d’identifier certains de ces passages.

A noter qu’en septembre 2016, une bague qui avait été posée sur une Pipistrelle de Nathisus en Allemagne avait été retrouvée en Franche-Comté à Clairvaux-les-lacs (39), soit une distance de vol direct de près de 662 kms !

– Et enfin, les chauves-souris effectuent des déplacements à l’automne, qui peuvent couvrir de grandes distances entre leurs gîtes diurnes et le ou les lieux qu’elles ont retenu comme lieu de rencontre au moment des amours.

De quoi prendre des précautions préalablement à l’installation d’infrastructures susceptibles d’entraver fatalement les routes de vol des chauves-souris qui ont-elles aussi les raisons de se déplacer pour leurs besoins vitaux !

Quelques éléments pour aller plus loin :


Biblio et webographie:

Les chauves-souris de France, Belgique, Luxembourg & Suisserthur L. & Lemaire M., 2015. Biotope, Mèze (Collection Parthénope), Muséum national d’Histoire naturelle, Paris 2 e éd., 544 p.

L. Rodrigues, L. Bach, M.-J. Dubourg-Savage, B. Karapandža, D. Kovač, T. Kervyn, J. Dekker, A. Kepel, P. Bach, J. Collins, C. Harbusch, K. Park, B. Micevski, J. Minderman (2015). Lignes directrices pour la prise en compte des chauves-souris dans les projets éoliens. Actualisation 2015. EUROBATS Publication Series N° 6 (version française). UNEP/EUROBATS Secrétariat, Bonn, Allemagne, 133 p. et annexes, consultables en ligne

https://www.sfepm.org/pdf/Annexe_3_distance_max.pdf,

Étude de la migration des chauves-souris en Bretagne 2013-2016  Rapport final 2017

http://chiroptera.fr/communaute/chiroblog/2512/migration-des-chauves-souris-en-europe/,

https://www.lpo-drome.fr/bilan-2017-suivi-de-migration-col-de-bataille/.