Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Tunnel du Bois Clair (Saône-et-Loire) : les chauves-souris devraient bientôt disparaître …

publié le19 mars 2009
Un peu d’histoire

Début des années 2000, des naturalistes bourguignons découvrent un nouveau site d’hibernation à chauves-souris (125 individus de 7 espèces) dans un ancien tunnel ferroviaire à Berzé-le-Châtel (Saône-et-Loire).

| Intérêt du site |
| Avec 6 espèces de l’annexe II de la Directive Habitats, le tunnel du Bois Clair offre la particularité d’accueillir des populations de chauves-souris en période hivernale et aussi une colonie de mise bas en période estivale.
En hiver, les principaux intérêts sont les effectifs importants pour le Grand rhinolophe, le Grand murin et la Barbastelle d’Europe (dépassant régulièrement les 50 individus) | A la même période, ils apprennent que le Conseil Général de Saône-et-Loire désire aménager une voie verte de Cluny à Mâcon passant par cet ancien tunnel. La Société d’histoire naturelle d’Autun (ShnA) propose en septembre 2001 des premières recommandations afin de prendre en compte les populations de chauves-souris dans le cadre de cet aménagement. Elles consistaient principalement à une fermeture en période hivernale du tunnel (pour sauvegarder les populations d’hibernation), à des éclairages adaptés et à la construction d’un grenier à chauves-souris (permettant de préserver la colonie de mise bas de Grands murins – 240 individus – de la fréquentation du site par le grand public).

Une mise en service en pleine période de mise bas des chauves-souris

Or, malgré ces recommandations précises, l’organisation de réunions et l’envoi multiple de courriers de différentes structures, rien ne sera fait avant la mise en service de cette voie verte en juillet 2004 ; travaux en période d’hibernation, aménagements farfelus (tubes plastiques rajoutés dans la paroi), éclairages mal placés, travaux sous la colonie de mise bas (en pleine période de naissances !, https://cpepesc.org/wp-content/uploads/2020/06/Travaux_13juillet2004-3.wmv), grenier à chauves-souris non adapté aux préconisations (pas d’isolant, mal placé, pas porteur), etc.

Pire, le dimanche 11 juillet 2004, une course à pied traversait le tunnel et les aménagements (pose du faux grenier non adapté, éclairages) se poursuivirent durant le mois de juillet ayant pour conséquence une sur-mortalité de la colonie de mise bas (34 cadavres récupérés par l’ONCFS à compter du 11 juillet !).

A la suite de ces évènements désastreux pour cette colonie et pour l’application de la loi de protection des espèces, la CPEPESC Nationale, associée à d’autres associations locales (Société d’histoire naturelle d’Autun et l’Association Ornithologique et Mammalogique de Saône-et-Loire), ont porté plainte devant le TGI de Mâcon et n’ont pas cessé de faire parvenir des courriers et de solliciter le Conseil Général de Saône-et-Loire et l’administration (Préfecture de Saône-et-Loire et DIREN Bourgogne) afin que des engagements soient pris pour la conservation de ce site.

Un des premiers gestes d’engagement de la nouvelle équipe du Conseil Général de Saône-et-Loire fut de fermer le tunnel du Bois Clair à compter du 11 octobre 2004 jusqu’au 30 mars 2005. Cette fermeture, temporaire mais non munie de portes en bois (selon les recommandations de la ShnA), n’empêcha pas la chute vertigineuse (baisse de 30%) des effectifs du site avec à peine 89 individus de 7 espèces.

En 2005, le temps de la protection du site …

Au printemps 2005 (le 27 avril), une réunion de concertation organisée par le Conseil Général de Saône-et-Loire a permis de mettre à plat l’ensemble des problèmes depuis les premières recommandations de 2001 afin, normalement, de repartir sur des bases saines. Or, le 10 août, nous n’avions pas reçu de nouvelles de la part du Conseil Général de Saône-et-Loire alors que nous devions être consulté pour la rédaction de l’arrêté de protection de biotope (signé par le Préfet de Saône-et-Loire le 26 juillet 2005) et les nouveaux travaux à entreprendre afin d’améliorer les conditions d’existence des populations de chauves-souris.

Nous apprenons aussi que l’ONCFS a été chargée d’un suivi des populations du site alors que, lors de la réunion du 27 avril, elle se déclarait incompétente sur le domaine. Enfin, après contacts auprès des services de la préfecture, nous apprenons que la dérogation à l’arrêté de protection de biotope pour la réalisation d’aménagements complémentaires notamment sur le grenier en septembre-octobre a été donnée sur la base de courriers (sans plan, sans la liste des matériaux utilisés, etc… Un comble !

Voilà, cela se passe comme cela en Saône-et-Loire, mais nous resterons vigilants sur l’application des recommandations établies et sur les mesures d’accompagnement (suivi des populations, nouveaux travaux, etc.) à mettre en place afin que les chauves-souris puissent continuer à venir en ces lieux pour y hiberner et s’y reproduire encore longtemps !

2 ans après …

Après de nouveaux évènements en 2006 (mortalité accrue de Grands murins en avril-mai, constatation du mauvais emplacement du faux-grenier pour les chauves-souris, fuite de la colonie de Grands murins), le Conseil Général de Saône-et-Loire a confié une mission à Christine HARBUSCH (experte chiroptères allemande) pour « améliorer » (sic !) les conditions d’accueil pour les chiroptères (autant pour l’hiver que pour l’été).
Une réunion a eu lieu en janvier 2007 afin de présenter les orientations 2007 (cf. documents ci-après téléchargeables).

Et 5 ans après l’ouverture du site, que reste-t-il ?

Les dépenses engagées par le Conseil Général pour la préservation (sic !) des chiroptères est aussi accessible en cliquant Fraisengages_CG71.pdf. A ce jour, près de 195 000 euros dépensés, bel somme pour de si beaux résultats !

Depuis 2006 (date du dernier bilan transmis par le Conseil Général de Saône-et-Loire), il est fort probable que de nouvelles dépenses ont été réalisées pour stopper la perte de la biodiversité ! Objectif 2010 d’après l’Europe ….

« Les résultats existent et seront communiqués. Sinon, ils n’ont pas d’intérêt. » Pierre MARTINERIE – courriel du 21 janvier 2007.

Grâce aux derniers résultats des suivis hivernaux (2008 & 2009) ainsi que les résultats estivaux (2007 & 2008), nous avons pu actualiser le graphique ci-après démontrant bien la chute des effectifs hivernaux (données issues des rapports de la Société d’histoire naturelle d’Autun) depuis l’ouverture au public jusqu’en 2009… A quand la disparition des 6 derniers individus de janvier 2009 ? 2010 ? 2011 ?
A venir le graphique des suivis estivaux …

Aujourd’hui, ce site semble être intégré au réseau Natura 2000 par le Psic « CAVITES A CHAUVES-SOURIS EN BOURGOGNE » (FR2600975). Un peu tard ou y-a-t-il un espoir ?

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La CPEPESC a réalisé lors des dernières rencontres nationales chiroptères (RNC) en 2006 & 2008, organisées par la S.F.E.P.M. et le Muséum d’histoire naturelle de Bourges, des posters sur cette affaire RNC2006_Poigneedechauves_souris.pdf Poster_MortChroniqueAnnoncee_RNC2008.pdf (pdf – attention près de 2 Mo).