Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Frotey-lès-Vesoul (70), la préfète de Haute-Saône condamnée à arrêter plusieurs sanctions administratives à l’encontre d’un exploitant agricole par le tribunal administratif de Besançon

publié le10 décembre 2017

L’élevage du Sabot est bien connu des habitants de la région de Vesoul. M. Claude LEVRET y élève des animaux en plein air (cochons, volailles et lapins) sur une surface d’une dizaine d’hectares incluse au sein du périmètre de la Réserve naturelle nationale du Sabot de Frotey-lès-Vesoul.

Un petit paradis pour les animaux… loin s’en faut car force est de constater que cette exploitation n’est pas conduite dans de bonnes conditions matérielles et sanitaires et cette réalité ne date pas d’hier.

AU sein du périmètre de la Réserve naturelle nationale du Sabot de Frotey

Au cours des deux dernières années, cette exploitation a fait l’objet de contrôles de la part des services de l’État. A chaque fois, plusieurs infractions ont été relevées : l’absence de registre d’élevage permettant de renseigner le mouvement des animaux (entrées et sorties), l’absence de convention d’équarrissage, un parcours inadapté pour les cochons, des clôtures non entretenues entrainant des divagations d’animaux et un état déplorable du site encombré de très nombreux déchets en tous genres…

Ces faits réitérés ont conduit l’administration à prendre enfin un arrêté de mise en demeure le 3 mars 2017 dans lequel il était exigé de la part de l’exploitant :

« Article 1er : Monsieur Claude LEVRET, Ferme du Sabot, lieu-dit « le Sabot » à Frotey-lès-Vesoul doit :

Article 1.1. : Remettre en état, avant le 20 juin 2017, les parcelles qu’il exploite et les rendre compatibles avec le statut de réserve naturelle conformément à l’article L. 332-1 du code de l’environnement.

Article 1.2 : Maitriser, contrôler et ramener dans des limites compatibles avec le statut de réserve naturelle des parcelles, le nombre de porcs présents (densité maximale de 15 animaux par hectare, les porcelets ne sont pas comptabilisés) et organiser une rotation, sur 3 parcelles au minimum, des animaux en fonction de la nature du sol et de la dégradation du terrain sur le site d’élevage, avant le 20 juin 2017.

Article 1.3 : Nettoyer et évacuer, dans un délai d’un mois, l’ensemble des déchets présents sur le site.

Article 1.4 : Tenir et mettre à jour, sans délai, un registre d’entrée/sortie permettant de suivre l’effectif présent sur le site ».

Après un contrôle le 7 avril 2017, la CPEPESC signalait le 11 avril à l’administration que le site n’était toujours pas nettoyé, qu’il présentait toujours un état déplorable offert à la vue de tous. Elle demandait alors à Mme la Préfète d’exécuter les termes de sa mise en demeure et de faire application des sanctions administratives fixées à l’article L. 171-8-II du code de l’environnement.

La situation n’avait que trop duré…

Confrontée – comme trop souvent – au refus d’agir préfectoral, la CPEPESC a saisi le tribunal administratif d’un recours de plein contentieux le 27 juin dans lequel elle demandait :

de constater que Mme la Préfète a commis un abus de pouvoir en refusant de faire exécuter les termes des articles 1.3 et 1.4 de sa mise en demeure préfectorale du 3 mars 2017,

– d’annuler la décision implicite de refus,

– d’enjoindre la Préfecture, sous astreinte de 300 € par jour de retard, d’arrêter une ou plusieurs sanctions administratives prévues à l’article L. 171-8, après avoir informé l’intéressé de la possibilité de présenter ses observations, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision,

ou

– d’ordonner directement dans le cadre du contentieux de pleine juridiction, en plus des sanctions prévues à l’article L.171-8, la remise en état du site, tel que le prévoit l’article 1.1 de l’arrêté préfectoral en cause.

Après un bref échange de mémoires, le tribunal a convoqué les parties le 9 novembre. Ce jour là, la CPEPESC a défendu le dossier sans contradicteurs, en effet ni M. LEVRET, ni la préfecture ne s’était déplacé.

Le jugement a été rendu le 7 décembre 2017 par le tribunal administratif de Besançon :

« …Article 1er: La décision par laquelle la préfète de la Haute-Saône a implicitement rejeté la demande de la Commission de Protection des Eaux de Franche-Comté tendant à l’exécution des dispositions relatives à la mise en demeure figurant à l’article 1.3 et 1.4 de son arrêté n° 70-2017-03-03-015 du 3 mars 2017 et à la mise en application dans les plus brefs délais des sanctions prévues à l’article L. 171-8 du code de l’environnement, reprises à l’article 2 dudit arrêté, est annulée.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de la Haute-Saône de:

1°) Suspendre le fonctionnement des installations, ouvrages activités de M. Levret sur le site dont s’agit, jusqu’à l’exécution complète des conditions imposées et prendre les mesures conservatoires nécessaires, aux frais
de M. Levret,

2°) faire procéder d’office, aux frais de l’exploitant, aux travaux figurant à
l’arrêté n° 7020170303015 du 3 mars 2017 de mise en demeure à l’encontre de M. Levret. Lesdits travaux devront avoir commencé à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la notification du présent jugement, sous une astreinte de 100 (cent) euros par jour de retard, passé ce délai ».


La CPEPESC s’assurera de l’exécution de cette décision et n’hésitera pas une seconde à demander la liquidation de l’astreinte en cas de retard pris par l’administration.

La situation n’avait que trop duré, les quelques 10 ha de M. LEVRET doivent recouvrer rapidement leurs fonctions écologiques.

.

NDLR.

Pour l’épilogue judiciaire de cette affaire en 2023. Voir : Sabot de FROTEY-LES-VESOUL. la CPEPESC avait bien raison!